Manager des personnalités difficiles et gérer les conflits

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3 questions à Francis Boyer, coach et expert en management des organisations publiques.

Nous sommes tous confrontés à des personnalités difficiles dans notre entourage professionnel. Notre style de management est-il alors à remettre à cause ?

Répondre par l'affirmative supposerait qu'il existe un "bon" style de management. Or, le style managérial est bien souvent lié à la personnalité. C'est pourquoi, si vous adorez les défis, les agents attachés aux usages vous agaceront. Si vous accordez de l'importance à préserver une ambiance calme et paisible, vous rencontrerez des difficultés à recadrer un agent, par crainte des tensions que cela pourrait engendrer au sein de l'équipe.

Le style d'un manager peut convenir à certains agents et pas à d'autre. Alors, que faire ?
Tout d'abord, il importe de prendre conscience des effets de son style de management sur ses agents. Fort de ce constat (qui n'est pas si facile), le manager à alors deux options :
1 - ne rien faire et expliquer à ses agents son mode de fonctionnement
2 - s'adapter à certaines personnalités

Il lui faudra alors apprendre à décrypter les différentes personnalités au travail, non seulement pour qu'il comprenne les raisons qui font qu'il éprouve des difficultés avec certains agents, mais aussi pour qu'il identifie ce qu'il doit modifier pour s'adapter aux personnalités qui lui posent problème.
S'il existe de bonnes pratiques managériales générales, le manager doit également "individualiser" son management. Pour se faire, il doit comprendre les différents types de personnalité au travail et acquérir des techniques d"apaisement des tensions.

Stress, fatigue, délais serrés, frustration, réorganisations...un manager peut être amené à faire face à des conflits au sein de son équipe. Quelles sont les attitudes à éviter et à privilégier dans de telles situations ?

Un conflit se déroule généralement en 4 étapes :
1 - la divergence, qui se traduit par l'expression de points de vues antagonistes (je ne suis pas d'accord)
2 - les tensions, manifestées suite au sentiment de ne pas avoir été considéré (tu ne m'écoutes pas !)
3 - le blocage. La communication est rompue, les non-dits sont nombreux, l'opposition augmente sans pour autant qu'elle soit manifestée auprès du manager (il est injuste !)
4 - le conflit ouvert. L'antagonisme n'ayant pas été traité, les parties s'opposent ouvertement (si vous ne faites pas ceci, attendez-vous à une grève sans précédent !).

La première attitude est par conséquent l'écoute, afin d'éviter de franchir la deuxième étape. Mais écouter ne signifie pas valider. La seconde attitude s'avère être le courage. Il faut montrer que l'on a compris, mais que l'on n'accepte pas pour autant. Enfin, la dernière attitude est le respect.

Un conflit est avant tout une différence de point de vue. Il est normal de ne pas être tout le temps d'accord. C'est pourquoi il est indispensable de gérer un conflit sur le plan cognitif et non affectif. Ce n'est pas parce que je ne suis pas d'accord avec vous que vous êtes pour autant un mauvais manager. 
Rappelons que nous sommes les champions du Monde du pessimisme depuis 2011 et que les Français ont la réputation d'être particulièrement critiques et râleurs.

La plupart des conflits mettent mal à l'aise. Et pourtant, c'est à travers le conflit que notre société a évolué (1789, mai 68). Plutôt que d'éviter à tout prix le conflit, il faut apprendre à le gérer de manière sereine et constructive car, à bien y réfléchir, le conflit est bien souvent source de progrès ?

Avez-vous des conseils à donner à un manager pour limiter les situations conflictuelles ?

Pour limiter les situations conflictuelles, un manager se doit :

- d'autoriser l'expression des divergences de points de vue. S'il le peut, nous lui conseillons d'instaurer des moments dédiés à l'expression d'insatisfaction ou de désaccord (telle que des réunions "d'amélioration continue") pour les canaliser dans un cadre collectif. Cette démarche doit être soutenue par une règle du jeu obligatoire : "chaque désaccord doit s'exprimer dans le respect mutuel et dans un état d'esprit constructif", car faire des reproches pour faire des reproches n"a aucun intérêt, sauf pour celui qui ne veut pas trouver de solution. Dans ce cas, la personne se mettra "hors jeu" vis-à-vis des autres.

- de manifester la prise en compte du désaccord et d'apporter une réponse au plus vite, quelle qu'elle soit ("telle est ma décision, je l'assume"). Par expérience, c'est davantage le manque de considération que le refus qui va aboutir à une situation conflictuelle. 

- de faire preuve d'empathie et de respect. "Je comprends, votre demande est légitime". Il n'y a rien de pire pour une personne de se sentir méprisée. Dans toutes nos formations, les participants sont unanimes : "nous attachons de l'importance à être considéré. A cette condition, nous acceptons une réponse négative". Une personne n'ira pas au conflit si vous ne donnez pas suite à sa demande en le lui annonçant de manière respectueuse et responsable, car, au fond, elle sait que tout n'est pas possible. 

Ne pas traiter un désaccord est souvent perçu comme un signe de faiblesse et de lâcheté. Paradoxalement, il nous semble primordial d'apporter une réponse à chaque objection pour préserver le lien et la qualité des relations professionnelles.

Il n'est pas dans nos habitudes d'autoriser l'expression des contestations. La tendance est généralement à l'évitement par peur d'aller au conflit. Or, c'est justement ce comportement qui aboutit au conflit. C'est pourquoi il importe de le gérer dès les premiers signes.

Au-delà des différentes techniques d'apaisement des tensions, la gestion d'un conflit repose avant tout sur une "posture managériale".

C'est pourquoi nous commençons toujours notre formation par l'introduction suivante : "le conflit, c'est sympa. Et j'ai 3 jours pour vous le démontrer".

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