Mieux réagir face à l'imprévu : regards croisés de 2 expertes

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ITW croisée de Valérie Lesage, comédienne-improvisatrice, et de Sophie Muffang, psychologue.

Elles animent la formation « Souplesse et ouverture d'esprit : S'ouvrir à l'imprévu en toute confiance »

« Souplesse et ouverture d'esprit », c'est assez énigmatique... Qu'entendez-vous par là ?

Valérie Lesage - Peut-on réellement « assouplir sa pensée » ? Tout dépend de ce qu'on entend par « assouplir » ! Nous dirons, par commodité, que l'on peut envisager d'assouplir sa pensée dans la mesure où l'on est avant tout conscient d'être quelque peu rigide. Et qu'est-ce qu'être rigide ? Etre rigide c'est s'arquebouter sur ses habitudes de pensée, sur ses principes, sur ses valeurs, bref, en clair, c'est ne pas sortir de sa "grille" de vision du monde.
En effet, tout individu qui parle de la réalité oublie trop souvent que cette « réalité » n'est que celle de celle ou celui qui l'énonce. L'humain ne dispose que de 5 sens pour appréhender le monde extérieur. Le 6ème sens (l'intuition) a été largement évacué de nos sociétés pour cause d'intangibilité ! Nous vivons dans un monde qui ne jure que par la raison, le palpable, le matériel et les études sur l'immatériel et l'intangible se développent depuis assez peu de temps et malheureusement essentiellement outre-Atlantique. La France est encore très cartésienne et demeure frileuse dans ce domaine d'étude.... dommage !
Assouplir sa pensée, c'est donc élargir sa vision et sa conscience.
Il faut bien comprendre que notre réalité est juste le fruit d'interprétation de nos 5 sens. Cette interprétation passe par le filtre de notre mental et donc de notre histoire personnelle. Chaque histoire étant singulière, chaque réalité est donc personnelle et subjective. Assouplir sa pensée, c'est donc apprendre à déplacer notre point de vue sur le monde extérieur comme on déplacerait un objectif photo sur un sujet. Pris sous divers angle, la réalité de cet objet nous apparait alors bien plus complexe et vaste qu'un unique point de vue...

Sophie Muffang - Je constate souvent que nous nous bloquons nous-mêmes par nos représentations mentales : par la façon dont nous regardons, jugeons, interprétons ce qui nous arrive ou ceux qui nous entourent.
« Assouplir sa pensée » vise à accepter d'accueillir ce qui vient avec moins de préjugés, d'habitudes mentales. Il faut commencer par en prendre conscience pour pouvoir ensuite les faire évoluer.
La vie devient alors beaucoup plus agréable à vivre : au lieu de craindre l'imprévu, on peut se permettre d'y prendre goût !

Quelles sont vos méthodes pour se défaire de ses schémas de pensée préétablis ?

Sophie Muffang - Il me semble nécessaire de commencer par prendre conscience de « comment on fonctionne ». L'Analyse Transactionnelle est à mes yeux un outil simple et opérant pour cela : le concept des Etats du Moi permet d'observer, mettre des mots, prendre du recul, pour ensuite changer ses schémas de pensée préétablis et ses manières de se comporter.
Il ne s'agit pas de faire un exposé théorique mais de mettre les participants en situation de découvrir par eux-mêmes, de s'observer, dans un climat protecteur / protégé pour en parler, réfléchir, et envisager des options.

Valérie Lesage - Il n'y a pas de méthode à proprement parler mais simplement une attitude consciente à avoir. Pour l'avoir, il faut avant tout devenir conscient de soi et des situations où nous nous trouvons. Sans cet état de conscience, pas de changement possible. L'individu qui pense et agit avec ses mêmes réflexes quotidiens devient peu ou prou rigide. Et plus le temps passe, plus il lui devient difficile de changer ses points de vue.
L'apprentissage consiste en la pratique d'une série de jeux improvisés (basiques au début puis plus complexes) obligeant les joueurs à élargir leur conscience dans un premier temps.
Les analyses simples des exercices improvisés ouvrent la voie des possibles. Les plus "rigides" discutent, négocient, justifient, expliquent pourquoi ils ne parviennent pas à adopter un autre comportement. Cette attitude est fréquente ! Nous sommes un peuple de débatteurs et il nous est souvent difficile de... lâcher-prise. Car c'est aussi de cela dont il s'agit si l'on souhaite assouplir sa pensée.

Dans la formation, vous associez « imprévu » et « confiance ». N'est-ce pas contradictoire ?

Valérie Lesage - Certainement pas ! L'imprévu et la confiance vont précisément ensemble. La plupart des gens sont aujourd'hui tellement demandeurs de sécurité, de sûreté, de verrouillage et de cadrage qu'ils en ont perdu la faculté d'accorder leur confiance aux autres. Ils n'ont pas vraiment confiance en eux et par conséquent ne peuvent donc pas l'accorder à autrui. En réalité, la Vie est une succession d'imprévus mais nous pensons que la planification de nos agendas, de nos trajets routiers ou de nos vacances ôte l'imprévu ou du moins en limite le phénomène. Rien n'est plus faux. Pour "gérer" les imprévus nous avons essentiellement besoin d'être confiant et d'accorder notre confiance. Même une préparation au millimètre ne garantie jamais les aléas qui font la vie. C'est d'ailleurs le grand souci de nos sociétés qui envisagent de se convaincre du contraire en installant des surveillances à tous les niveaux, des évaluations, des suppositions, des profilages, des lois, des règles, etc...
Pour gérer les imprévus de la vie, il faut impérativement garder confiance en soi, en les autres, en la vie. Il faut apprendre ou réapprendre à voir autrement, plus loin, à oser. Il faut cesser d'avoir peur de tout.
Et c'est justement lorsqu'on apprend cela que notre 6ème sens, l'intuition, se développe !

Sophie Muffang - En fait, plutôt que « contradictoire » qui oppose, je dirais « complémentaire », parce que la vie sollicite en permanence notre confiance en nous et dans les autres, en nous confrontant à des situations imprévues.
Cette formation a pour but de faire cohabiter « imprévu » et « confiance » en toute sérénité.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Sophie Muffang - Psychologue et formatrice, j'accompagne les changements de vie professionnelle et personnelle depuis 1991 de façon individuelle et collective.
Je suis quelqu'un de pragmatique : l'Analyse Transactionnelle a été pour moi une découverte forte, signifiante, c'est la raison pour laquelle j'aime me référer à elle et que je l'utilise fréquemment.
Le ludique, les échanges me stimulent, je propose de passer par cette voie pour progresser.
Je crois à la méthode des petits pas. On fait des grandes choses, on réussit sa vie jour après jour, dans les détails du quotidien.
J'aime la vie. J'en ai connu la noirceur trop tôt, je me suis construite sur cette expérience, j'ai essayé pendant longtemps de l'évacuer, peine perdue ! J'ai fini par comprendre qu'il valait mieux l'accepter et j'ai retrouvé mon intégrité.

Valérie Lesage - Titulaire d'un DUT Gestion des Entreprises et des Administrations, j'ai obtenu mon premier poste d'encadrement à 21 ans dans le groupe Promodès. En parallèle, je pratiquais le théâtre et la danse en amateur. En 1988, j'ai quitté le monde de l'entreprise pour me professionnaliser dans le théâtre et j'ai alors rencontré l'improvisation théâtrale avec la Ligue d'Improvisation Française. J'interviens en entreprise depuis près de 15 ans en proposant des interventions basées sur les techniques de l'improvisation théâtrale. Ce qui me plait, c'est de travailler sur la relation à l'autre et la communication orale.

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