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Dirigeants, l’heure des émotions a sonné !

Dirigeants, l'heure des émotions a sonné !

Quel leader n’a pas expérimenté l’épuisement à force de manquer de sincérité, de subir un désalignement entre ses vies personnelle et professionnelle, de préserver constamment des espaces sécurisés pour se prémunir des porosités entre deux mondes ? A l’heure de la multiplication des burn-out, bore-out et autres, la voie gagnante semble être celle de la réunification des différentes facettes de son existence.

Les dirigeants oscillent souvent entre une double interrogation : faut-il être soi-même au travail, ou bien se créer une image professionnelle sous contrôle pour être irréprochable ?

A présent, la balance penche irrémédiablement du côté de l’authenticité. Le dirigeant doit être capable de montrer ses vulnérabilités et ses doutes, plutôt que de donner à voir une image artificielle.

Cependant, un tel lâcher-prise est particulièrement difficile à mettre en oeuvre pour ces profils de haut niveau, ces experts du cerveau gauche, formés à tout sauf à laisser libre cours à leurs émotions. Comment se réincarner pour mieux diriger ?

Déjouer l’injonction de suradaptation

La sphère professionnelle fait face, depuis un siècle, à une problématique de dévalorisation des émotions au travail. L’environnement, la pression, les manières de travailler contraignent le dirigeant à se soustraire de sa sensibilité naturelle.

Incité à mettre ses ressentis de côté, ce dernier entre dans une logique de suradaptation permanente pour donner le change. « Porter un masque », « revêtir une armure », autant d’images révélatrices d’un rapport au monde strictement contrôlé et manquant cruellement d’authenticité.

La suradaptation rencontre vite ses limites. Quel dirigeant n’a pas expérimenté l’épuisement à force de manquer de sincérité, de subir un désalignement entre ses vies personnelle et professionnelle, de préserver constamment des espaces sécurisés pour se prémunir des porosités entre deux mondes ? A l’heure de la multiplication des burn-out, bore-out et autres, la voie gagnante semble être celle de la réunification des différentes facettes de son existence.

Il n’empêche. La plupart des leaders cherchent à résister à l’impératif du lâcher-prise. Ils ont besoin d’être accompagnés, rassurés. Cette problématique touche particulièrement les profils féminins.

Démarche vertueuse

Les femmes ont dû, pendant des années, se battre pour atteindre des postes à haut niveau de responsabilité, en travaillant souvent davantage que les hommes et en veillant à être irréprochables. De tels parcours professionnels conduisent à se forger des armures épaisses, bien difficiles à ôter sans une volonté personnelle de changer. Pour autant, révéler sa véritable personnalité est une démarche vertueuse.

Dès les processus de recrutement, la personnalité du dirigeant est prise en compte. Le caractère, les valeurs, les convictions sont autant de composantes à l’origine de l’« ombre portée du dirigeant », tout aussi importante pour un profil de haut niveau que l’expérience professionnelle ou le niveau d’études. Pour convaincre, le dirigeant est invité à donner à voir une image fidèle de sa personne, à travers ses forces et ses aspérités.

« C’est par la faille que jaillit la lumière », chante Leonard Cohen. Cela peut paraître contre-intuitif au premier abord, mais les failles de chacun peuvent bien devenir créatrices de valeur.

Dans un monde complexe, volatil et incertain, prétendre avoir une image parfaitement lisse et homogène est illusoire. Le vrai leader est en mesure de connaître puis de surmonter ses contradictions, et d’investir son énergie dans une image fidèle à ce qu’il est.

Être soi-même, gage d’une performance durable

En étant authentique, le dirigeant se place naturellement dans une zone « de support et de challenge ». Autrement dit, dans un lâcher-prise en confiance qui lui permet d’être plus performant. Se met alors en place un mécanisme qui renforce cette nouvelle, confortable et efficace posture.

Par ricochet, un comportement aussi exemplaire autorise les équipes à adopter à leur tour les bons réflexes. Encouragés par une sécurité psychologique – le premier facteur des mécanismes de travail collaboratif -, les salariés vont mieux s’organiser et déléguer avec une confiance permettant de décupler la performance de chacun. Ces dynamiques vertueuses de création de performance irradient ensuite sur l’ensemble de l’organisation dans la durée.

« Connais-toi toi-même », lisait-on déjà sur le fronton du temple de Delphes dans la Grèce antique. Une maxime plus que difficile à réaliser à l’heure où des injonctions en tout genre (marketing, politique…) façonnent et formatent les profils des grands de ce monde.

L’authenticité est un combat de chaque instant. Pour autant, nous assistons depuis peu à l’émergence de nouvelles générations soucieuses de ces sujets et désireuses d’être alignées avec elles-mêmes. Devenir qui nous sommes vraiment : un nouveau gage de réussite ?

Par Claire Babel et Hervé Borensztejn, associés de Heidrick&Struggles

 

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