Olivier Cimelière, Fondateur, Heuristik Conseil présidera la Conférence Tendances Communication mardi 25 novembre à Paris (et en visio).
Dans cet entretien, il nous livre ses réflexions sur les défis et enjeux que les communicants devront relever en 2026 ?
Quels sont, selon vous, les trois principaux défis que vont devoir relever les communicants d’ici 2026 ? et comment s’y préparer dès aujourd’hui ?
En premier lieu, il y a l’incontournable IA. Ne pas prendre la vague maintenant relève de la « faute » professionnelle. Il est vraiment essentiel que les communications sachent de quoi il retourne et qu’ils expérimentent différents outils en fonction de leurs centres d’intérêt. L’IA est un fantastique assistant pour créer et gagner du temps sur des tâches à faible valeur ajoutée humaine.
C’est d’autant plus important de la comprendre qu’elle est au cœur du deuxième défi : la désinformation accrue et la nécessité d’avoir un dispositif de veille beaucoup plus puissant qu’une veille presse et deux ou trois alertes Google. Les marques et les entreprises sont de plus en plus prises à partie, notamment sur TikTok. Il est indispensable d’avoir la capacité d’anticiper plutôt que subir une attaque réputationnelle et de bien connaître ses communautés.
Enfin, communication interne et marque employeur vont devoir se repenser pour continuer à susciter du sentiment d’appartenance, de l’adhésion et de l’engagement. Entre le télétravail qui fragmente et le désenchantement global des collaborateurs, il y a urgence à proposer un récit commun plus attirant et inclusif et plus seulement de la parole descendante et à distance.
Face à la montée en puissance de l’IA et de l’automatisation, comment les communicants peuvent valoriser leur savoir-faire humain et rester indispensables ?
En amont, le savoir-faire humain réside dans l’art du prompt ! Plus votre question ou votre requête sera précise, articulée et calibrée, meilleures seront les propositions d’une IA générative. Le prompt est comme un mini-brief. Si c’est fouillis ou trop succinct, l’IA ne fera pas de miracle. Il restituera le flou ou l’imprécision.
En aval, il convient de toujours conserver un esprit critique par rapport aux résultats fournis. Il faut double-vérifier ou alors demander d’affiner et ne pas se contenter de copier-coller en prenant tout pour argent comptant et vrai. L’IA reste une IA qui parfois peut se nourrir avec de mauvais modèles de langage, voire avoir des hallucinations. L’IA n’est qu’un outil qui permet de faire plus vite des tâches qu’un cerveau humain ne peut pas faire. Mais c’est ce dernier qui garde le contrôle sur ce qui est pertinent ou pas.
Comment la multiplication des canaux et la fragmentation des audiences obligent les communicants à repenser leur stratégie de contenu et d’engagement ?
Avant de s’inquiéter de la multiplication des canaux, il y a une évidence toute simple, tellement simple qu’elle est encore souvent perdue de vue : savoir qui sont les cibles auxquelles on veut s’adresser ? Et quels sujets vous voulez traiter avec celles ? Clarifier ces deux points fournit déjà deux tiers au moins de la réponse pour déterminer les canaux où il faut prendre pied ou bien amplifier la présence.
Ensuite, il s’agira de proposer des contenus utiles, ludiques, motivants, intéressants et ne pas sombrer dans l’arrosage automatique. L’infobésité est assez répandue comme cela pour qu’on n’y ajoute pas encore du gras superflu. Ce n’est pas parce que l’on converse moins qu’on devient moins visible. C’est la qualité qui nourrit l’échange.
La communication responsable et l’engagement sociétal des entreprises sont-ils devenus incontournables ? Comment chaque métier de la communication peut-il s’en emparer concrètement ?
Concernant la communication responsable, les communicants ont clairement la main.
A eux déjà de veiller à l’empreinte environnementale de tel ou tel outil ou opération événementielle. Ensuite, il s’agit aussi de repenser les récits et les narratifs qui aujourd’hui encore, restent très imprégnés de références à la société consumériste ou qui lorgnent alors vers du greenwashing qui ne dit pas son nom. Le communicant doit être force de conseil et de conviction sur ces points.
Pour ce qui est de l’engagement sociétal, la position du communicant est un peu différente. Il est certes force de proposition mais il est aussi accompagnateur des programmes et des initiatives qui mobilisent de très nombreux pans de l’entreprise ou de l’organisation.
Un point toutefois : il faut rester vigilant sur une tendance qui commence à poindre en France et qui est très prégnante aux Etats-Unis. La responsabilité sociétale est particulièrement combattue par quantité de mouvements très conservateurs et beaucoup d’entreprises ont reculé, voire abandonné, leurs investissements verts et leurs actions de diversité, équité et inclusion face à la pression qui leur est exercée. Les prémices sont déjà à l’œuvre en France.
Quelles compétences nouvelles ou transversales devront maîtriser les communicants pour rester compétitifs et créatifs dans un environnement en constante mutation ?
En termes de compétences techniques, l’IA occupe une place centrale. Il ne s’agit pas de devenir un praticien hors pair des outils qui y sont liés mais d’avoir au moins une connaissance générale des possibilités et du fonctionnement et ne pas hésiter à faire des petits pilotes ou galops d’essai dans le cadre d’un projet. C’est le meilleur moyen d’acquérir de la compétence.
Pour le reste, et notamment sur les « soft skills », cela ne change pas vraiment même si le contexte est plus évolutif. Un communicant se doit d’être en permanence curieux et ouvert, au contact de ses publics internes et externes. C’est la condition pour bâtir des stratégies de communication pragmatiques et pertinentes à la fois.
Enfin, il faudrait parvenir à sortir du syndrome de la boîte à outils qui veut que faire une chose est une finalité en soi. Editer un site Web, réaliser des vidéos, écrire des contenus ou organiser des conférences sont indispensables mais ces actions sont au service d’une vision et d’une stratégie qui sert la réputation d’une entité. Or trop souvent encore, on réduit le communicant à un faiseur alors qu’il est aussi un penseur d’autant plus qu’il est l’un des rares à côtoyer tous les publics d’une organisation.
Retrouvez Olivier Cimelière qui présidera la Conférence Tendances Communication
mardi 25 novembre 2025 à Paris (et en visio).