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Pour ne pas perdre la raison… d’être de nos entreprises

Retrouver notre raison d'être face au covid-19 avec l'aide des juristes d'entreprise

Chronique – Gestionnaires du risque de l’entreprise, les juristes ont été sur tous les fronts dès les débuts de la crise sanitaire. Ce sont ces mêmes gestionnaires du risque qui doivent désormais accompagner la reprise d’activité de nos entreprises sans frilosité, en rendant confiance aux entrepreneurs, en rassurant les salariés les plus récalcitrants et en stimulant l’innovation. C’est la responsabilité collective qui doit dépasser les intérêts particuliers.

Et si nous avions perdu la raison ?
La communauté des juristes d’avant la crise sanitaire s’était emballée sur la raison d’être . On pouvait à loisir en découvrir les immenses mérites et reconnaître au fil des nombreux colloques et tables rondes sur la loi Sapin 2 tout le bien qu’il fallait (au sens obligation légale mais aussi choix éthique) en penser.

L’arme de l’analyse des risques

Il se trouve que les juristes ont été précipité dans le principe de réalité depuis le 16 mars dernier.
Le confinement avec toute la brutalité des mesures qui l’ont accompagné a entraîné la fermeture de nombreuses entreprises ou à tout le moins le ralentissement de la plupart des activités et engendré la mise au chômage partiel de millions de salariés.

Les directions juridiques, en revanche, n’ont pas chômé. Sommées d’apporter un soutien vigoureux à leurs directions générales, elles ont :

  • accompagné avec efficacité et courage les prises de décisions,
  • éclairé les dirigeants sur les trop nombreux textes du gouvernement,
  • digéré et interprété les circulaires,
  • noué le dialogue avec les partenaires sociaux et commerciaux,
  • parés aux conséquences de la fermeture des tribunaux,
  • organisé des visio-conseils d’administration… leur combat était sur tous les fronts.

Leur arme : l’analyse de risque.
C’est parce que les directeurs juridiques et leurs équipes ont eu l’audace de prendre en compte les questions d’occurrence, de comprendre les objectifs et de faire des choix parfois contre intuitifs que les entreprises françaises ont traversé la tempête.

Notre économie frappée de plein fouet est aujourd’hui appelée à sortir de sa torpeur. Le gouvernement a entamé la grande marche vers le retour au monde d’avant. Nos amis européens à qui nous avons emboîté le pas s’y emploient aussi. Mais la France peine à se remettre d’aplomb. On lit la crainte sur les visages. Dans un monde où « tout ce qui vient amenuiser le risque est sacralisé » (Cynthia Fleury) les entreprises françaises hésitent, tergiversent. Il faut dire que la société française dans son ensemble apparaît bien timorée.

Redonner confiance

Et si nous avions perdu la raison d’être de nos entreprises ?

  • celle de créer de la valeur,
  • celle d’employer des femmes et des hommes qui vivent de leur travail,
  • celle d’innover,
  • celle de participer à l’effort national pour offrir à notre nation la fierté des champions pour jouer en tête de palmarès en politique internationale ?

Il appartient à la communauté des juristes de redonner confiance à nos entrepreneurs, de rassurer les dirigeants confrontés à des décisions difficiles, de s’assurer que les salariés bénéficient de la sécurité nécessaire à leur retour sur site.

Encadrer ne signifie pas étouffer. Il faut que l’activité reprenne et que les Français retrouvent leur place dans le tissu économique. Juges, avocats, juristes d’entreprise : le moment est venu d’adopter les préceptes de la gestion du risque, et de tisser ensemble, et en confiance, une plateforme commune de stabilité économique.

Rejetons collectivement une application extensive du droit pénal, une interprétation élargie des règles du droit social , une acceptation velléitaire du concept de la force majeure. C’est une responsabilité collective qui appartient à chacun, au-delà des intérêts individuels. Refusons de collaborer à l’asphyxie de notre société.
Ne laissons personne piétiner notre raison d’être : celle d’assurer la sécurité de la prospérité du plus grand nombre.

Par Laure Lavorel, présidente du Cercle Montesquieu, association de directeurs juridiques

 

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