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La quantité de travail reste un problème français

La quantité de travail reste un problème français

Une étude annuelle de Rexecode confirme que les salariés à temps complet français sont ceux qui travaillent le moins en Europe (hormis la Finlande).

Pour être honnête, l’auteur de ces lignes a hésité à évoquer la nouvelle étude de Rexecode comparant les durées de travail en Europe : une nouvelle fois, les Français sont ceux qui travaillent le moins (hors Finlande). Si on prend en compte le temps de travail réel (durée légale, congés, RTT, arrêts maladie, heures supplémentaires), le résultat est de 1.668 heures en 2022, soit 124 heures de moins que la moyenne européenne.

Le moment d’hésitation passé, il n’est pourtant pas inutile d’y revenir parce que ce document (tiré d’éléments fournis par Eurostat) a immédiatement suscité une contre-offensive pour dire qu’il n’y a pas péril en la demeure. Le premier argument est que ce chiffre concerne les seuls salariés à temps complet. Avec ceux à temps partiel, la France reste en dessous de la moyenne, mais moins, et elle repasse au-dessus de l’Allemagne.

C’est factuellement exact. Mais c’est un faux-semblant. La réalité plus crue est qu’il y a moins de salariés à temps partiel en France qu’en Allemagne (et qu’ailleurs) et que cela témoigne du fait qu’il y a moins de personnes au travail chez nous. Même s’il progresse, ce que l’on appelle le taux d’emploi (15-64 ans) est, ici, encore inférieur de 10 points à ce qu’il est Outre-Rhin. Le problème est que cela se ressent sur l’activité et les revenus.

Le second argument pour minimiser ce temps de travail plus faible en France qu’ailleurs concerne la productivité. « Nous travaillons moins, mais notre efficacité est la meilleure du monde, cela compense », entend-on depuis 20 ans. Notre productivité est effectivement bonne, mais non seulement elle s’explique par un taux d’emploi plus faible (les plus jeunes et les plus vieux ne travaillent pas), mais en plus elle recule depuis 4 ans.

Non, ce qui frappe sur ce sujet, ce sont deux choses. Un : la quantité de travail est particulièrement faible en France si on prend le nombre total d’heures travaillées divisé par le nombre de Français (et non plus par les seuls travailleurs). Deux : la conséquence est que le PIB par habitant a reculé relativement aux autres pays. En 2000, il dépassait de 18% la moyenne européenne. Il est aujourd’hui juste dans la moyenne.

Résumons : nous travaillons moins, nous sommes moins nombreux à travailler, et notre productivité se tasse…. Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si nous étions satisfaits (ou si nous nous disions satisfaits) de ce choix sociétal comme l’on dit. Ce n’est manifestement pas le cas. Or ces choix collectifs ont des conséquences sur les niveaux de vie et les prélèvements pour prendre en charge ceux qui ne travaillent pas.

D’autres facteurs que le passage aux 35 heures expliquent-ils ce moindre temps passé au travail ? On invoque parfois un changement dans la relation au travail. Il existe, ne serait-ce que l’envie d’un meilleur équilibre de vie. Mais en quoi serait-ce différent d’ailleurs ? On évoque aussi des conditions de travail plus tendues en France, par exemple sur le plan managérial (verticalité, exclusion des seniors). Est-ce vraiment le cas ?

Dans un pays qui vieillit et qui a des dépenses collectives à financer (santé), il parait difficile de ne pas ouvrir le débat sur la quantité de travail – sauf à accroître l’immigration. D’ici là, retenons que les salariés allemands à temps complet travaillent 3 semaines de plus que nous par an et que les non-salariés (commerçants, professionnels libéraux, artisans) travaillent 11 heures par semaine de plus que les salariés ! Oui, 11 !

Par Dominique Seux

 

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