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Au fait, le ‘design thinking’ à quoi ça sert ?

Design ThinkingDesign Thinking

DECRYPTAGE //Cette approche créée dans les années 1980 est efficace pour satisfaire le besoin de changement des employés. Du management à la structure des organisations : le design thinking éclate les carcans.

Abattre les murs entre les personnes pour créer un collectif efficace : c’est l’un des objectifs majeurs du « design thinking », ou « pensée design ». « Ensemble, nous sommes plus intelligents que n’importe lequel d’entre nous », résume l’un des fondateurs américains de cette approche, Tim Brown, dans son ouvrage L’Esprit design (éditions Pearson).

« Les designers ne conçoivent pas seulement des chaises, rappelle Aurélie Marchal, spécialiste en design thinking. Leur esprit analytique, qui questionne sans préjugés, peut décortiquer un ensemble complexe, comme la structure d’une société. Et proposer de nouvelles interactions pertinentes grâce aux remarques des acteurs concernés associés au projet de refonte« . Une philosophie collaborative qui contribue à améliorer le bien-être des employés dans l’entreprise à long terme.

Des ethnologues pour casser la glace

Et cela passe avant tout par la libération de la parole. « Quand on veut revoir l’organisation d’une entreprise, les designers mènent souvent une série d’entretiens avec les collaborateurs pour identifier les points de friction et trouver les meilleures solutions », explique Thomas Nicot, cofondateur de Sphères, un bureau de design et d’innovation.

Châteauform’, spécialisé dans l’organisation d’événements interentreprises, en a fait l’expérience. « En tout, Sphères a interrogé environ 130 de nos collaborateurs, l’échantillon représentatif des différents profils de notre société », raconte Anne Griffon, directrice marketing et innovation de Châteauform’.

En 2017, cette société de 2.000 employés lance son chantier de transformation digitale pour concevoir de nouveaux outils et faciliter la vie de ses employés. « L’objectif des interviews était de comprendre comment les employés travaillaient et quels problèmes ils rencontraient dans leur quotidien », ajoute la cadre. Résultat : les personnes se sentent écoutées et valorisées. « Grâce à cette phase exploratoire, la société recrée un sentiment d’appartenance chez ses employés et réengage les équipes », analyse Thomas Nicot.

Certaines sociétés de design, comme YouMeO, font même parfois appel à des ethnologues pour piloter l’étape des interviews. « Ils parviennent à interpréter en profondeur les désirs des employés, pas toujours exprimés », estime Raphael Beziz, cofondateur du cabinet. Les collaborateurs d’une grande banque tricolore se plaignent de l’inutilité du service voisin et vice versa ?
Les ethnologues comprennent que le personnel manque de visibilité au sein de l’organisation. « On a donc réalisé une série de posters affichés dans l’entreprise pour rappeler la valeur apportée par chaque maillon de la chaîne de production », explique Raphael Beziz. « Et aujourd’hui, les conflits entre “villages gaulois” ont quasiment disparu », observe-t-il.

Le groupe projet, moteur de la discussion

En parallèle ou après la phase d’entretiens, selon le bureau de design sollicité, un « groupe projet » est créé. « Pour résoudre un problème complexe, toutes les compétences sont réunies dans cette équipe, il faut donc associer tout le monde, et éclater les carcans hiérarchiques afin de laisser chacun s’exprimer » avance Thomas Nicot.

En général, ces groupes projets ne dépassent pas 20 personnes. Discussions nourries de la phase entretiens, idées recueillies puis sélectionnées : cette cellule en effectif réduit est le moteur du changement… et le moyen de déminer les problèmes. Lionel Cambos, directeur de l’Orange Innovation School, une école de formation au sein du groupe Orange, abonde : « Pour créer un nouvel espace de travail à Châtillon, on a sollicité l’école de design de Nantes et créé un groupe projet associant les futurs salariés du site ». Il poursuit : « Ils ont ainsi contribué à l’élaboration du projet dès le départ. Cela nous a évité pas mal de frustrations et, surtout, des décisions unilatérales trop éloignées de la réalité des travailleurs ».

Des prototypes qui rappellent la méthode agile

Mais la force du design thinking, c’est de proposer rapidement des prototypes, grâce à la qualité de conception du designer, et de les utiliser en situation réelle. « Cette phase rappelle la méthode agile utilisée en informatique, qui innove par itérations », analyse Raphael Beziz. En clair, le produit en développement, un logiciel ou un objet par exemple, sont testés et améliorés jusqu’à ce qu’ils conviennent à tout le monde.

« On redonne du sens au travail par l’action », ajoute Thomas Nicot, chez Sphères. « Contrairement aux PowerPoint abstraits, nos prototypes permettent de visualiser concrètement les solutions ». Une dynamique qui tire le moral des employés vers le haut. « Les designers sont à la fois des intellectuels et des ouvriers, ils conçoivent avec leurs mains, et pas seulement avec leur tête, de nouvelles expériences tangibles », constate Aurélie Marchal. Deux qualités décisives pour matérialiser les souhaits des collaborateurs, recréer du lien et de l’engagement au travail.

Adrian de San Isidoro

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