Attribuer les congés est souvent un défi pour les entreprises. Entre contraintes légales et attentes des salariés, les employeurs doivent arbitrer.
« L’été, c’est souvent le casse-tête des RH et des managers. Il leur faut trouver comment laisser chacun souffler, sans désorganiser toute l’entreprise », constate Maud Grenier, cofondatrice du Temple RH, centre de formation destiné aux RH.
Pas simple de contenter tout le monde quand chacun fait valoir ses arguments : un conjoint qui ne peut se libérer qu’en août, des amis qui ont déjà réservé un logement au soleil en septembre, des enfants qui doivent être gardés mi-juillet, davantage d’ancienneté que d’autres collègues…
Mais pour décider qui part quand et qui est prioritaire sur qui, l’employeur n’a pas totalement le champ libre. « Il doit prendre en compte des critères fixés par accord d’entreprise, ou à défaut par accord de branche. Faute de quoi il faut se référer au Code du travail. En pratique, il est très rare qu’un accord collectif fixe des critères différents de celui-ci », détaille Olivier Thibaud, avocat spécialisé en droit du travail, associé au sein du cabinet Littler France.
L’ancienneté compte
Si l’on s’en tient au Code du travail, l’employeur doit entre autres étudier « la situation de famille des bénéficiaires », notamment les possibilités de congé de leur conjoint ou de leur partenaire pacsé.
Autre critère qui pèse dans la balance : si les salariés ont, au sein de leur foyer, un enfant ou un adulte handicapé ou une personne âgée en perte d’autonomie. Ceux qui ont davantage d’ancienneté dans l’entreprise sont aussi prioritaires sur ceux recrutés plus récemment.
Dernier critère étudié : si les collaborateurs ont une autre activité chez un autre employeur, qui leur nécessite de s’absenter à certains moments. C’est avec toutes ces données que l’employeur est censé trancher. Et ce, en respectant par ailleurs une règle : si des salariés pacsés ou mariés exercent au sein de sa structure, il doit leur permettre de s’absenter en même temps s’ils le souhaitent.
Bien souvent, les parents sont priorisés par les employeurs pour poser des jours off pendant les vacances scolaires, parfois au grand dam de salariés sans enfant qui aimeraient eux aussi prendre le large à ce moment-là.
Les employeurs sont-ils dans leur bon droit en donnant la primeur aux parents ? Ont-ils l’obligation de leur accorder ces périodes ? « Le Code du travail ne dit rien d’explicite à ce sujet, constate Olivier Thibaud. S’il est assez logique de leur donner la priorité durant ces périodes, d’autres critères peuvent être pris en compte. Dans tous les cas, l’employeur n’est pas légalement tenu d’accorder aux parents des congés pendant les vacances scolaires, car leur absence doit aussi être compatible avec l’activité et l’organisation de l’entreprise. »
Au moins deux périodes dans l’année
Dans certaines entreprises, les périodes de congé sont imposées – par exemple parce que la production s’arrête. Dans ce cas, l’employeur doit vous faire connaître vos dates de congé au moins un mois avant le départ.
Vous avez cinq semaines de vacances dans l’année et votre entreprise aimerait que vous posiez tous vos congés d’un coup ? Impossible : vos congés doivent au moins être décomposés en deux temps sur l’année – par exemple quatre semaines et une semaine.
Il existe cependant deux exceptions à cela, permettant aux salariés d’accoler leurs congés : « S’ils justifient de contraintes géographiques particulières – par exemple s’ils exercent dans l’Hexagone et viennent de territoires ultramarins – ou de la présence au sein du foyer d’un enfant ou d’un adulte handicapé ou d’une personne âgée en perte d’autonomie », précise le spécialiste en droit du travail.
Un rétropédalage possible
Que votre employeur vous impose des congés ou qu’il vous consulte en amont, « vous devez pouvoir vous absenter au moins deux semaines continues pendant la période dite ‘de prise’, c’est-à-dire par défaut entre le 1er mai et le 31 octobre, cette période pouvant être étendue par accord collectif », indique Olivier Thibaud.
Votre employeur vous a donné son feu vert pour lever l’ancre quand vous le souhaitiez, mais il a finalement changé d’avis ? « Il peut reporter vos congés jusqu’à un mois avant votre départ. A moins qu’il y ait une circonstance exceptionnelle, comme l’absence non prévue d’un autre salarié ou une commande d’ampleur qui ne pouvait pas être anticipée, qui explique qu’il vous informe plus tard », explique Olivier Thibaud.
Chloé Marriault