Le référent unique dans l'administration
Gestion publique

L’expérimentation du référent unique

Le référent unique dans l'administration

Quel usager ne s’est jamais plaint de perdre du temps en ne trouvant pas un seul interlocuteur pour enregistrer et faire le suivi de ses démarches auprès d’une administration ?

Afin de redéfinir et de renforcer durablement le lien entre l’administration et l’usager, l’article 29 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance[1] et son décret d’application n°2018-1352 du 28 décembre 2018[2] ont ouvert la possibilité pour les services de l’Etat et pour certaines collectivités territoriales qui en feront la demande d’expérimenter l’existence d’un référent unique jusqu’en fin d’année 2022. Dans ce contexte, voici un récapitulatif des règles en vigueur.

Le rôle du référent unique

La justification de la création du référent unique se trouve dans l’exposé des motifs de la loi : « la multiplicité des acteurs au sein des services publics est, en effet, source de complexité, de perte de temps pour l’usager et d’inefficacité pour l’administration. Elle nuit à la construction du lien de confiance »[3].

La création, à partir de 2007, de « guichets uniques » a déjà réduit le nombre de points d’entrée dans l’administration. L’article 29 de la loi précitée va plus loin en définissant d’abord le référent unique comme celui : « à même de faire traiter des demandes qui lui sont adressées pour l’ensemble des services concernés.

Ce référent unique est joignable par tout moyen par les administrés au sein de l’agence ou de l’antenne dont ils dépendent. »[4] L’article 1er du décret précité précise ensuite que le référent unique : « centralise les demandes des usagers.

Il collecte, auprès de l’usager ou des différentes administrations concernées, les documents nécessaires à l’instruction de sa demande et attribue la demande au service compétent en vue de son traitement »[5].

L’article 3 dudit décret énonce enfin que les administrations devront publier en ligne sur leur site internet les coordonnées du référent unique, ainsi que le domaine de compétences correspondant.

Par conséquent, les textes laissent une grande liberté aux administrations pour choisir les personnes référentes et pour définir le processus de collecte et de centralisation des demandes.

Ainsi comme illustration du rôle du référent unique, l’exposé des motifs du projet de loi cite des initiatives engagées par les ministères dès 2018 : «Des pôles d’action économique, implantés dans chaque région douanière, seront les référents uniques des entreprises, chargés à la fois de les orienter dans leurs demandes d’assistance réglementaire, de les conseiller à l’exportation ou encore de les aider dans l’identification du service douanier le plus proche.

[…] Le ministère de l’éducation nationale va expérimenter, dans le ressort de l’académie de Clermont-Ferrand, la mise en place d’un référent unique, qui, en complément des équipes pédagogiques et administratives des écoles, collèges et lycées et des dispositifs de saisine par voie électronique déjà existants, sera à même de prendre en charge les demandes des usagers et d’en assurer le suivi.

Ce référent assurera notamment le lien entre l’usager et le service compétent pour répondre à sa demande, dans l’ensemble du champ de l’éducation nationale (démarches liées à la scolarisation en école, collège, lycée, en établissement spécialisé ou à distance, demande de bourse, etc).»[6]  L’expérimentation reste cependant ouverte à un  nombre limité d’administrations.

Les administrations autorisées à expérimenter

L’article 2 du décret précité a dressé la liste des administrations compétente pour instituer un référent unique dans les domaines relevant de leurs compétences.

Il s’agit des administrations de l’Etat, des établissements publics de l’Etat – l’ensemble des EPA et de dix-huit EPIC[7], dont l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’agence nationale pour la formation professionnelle des adultes et la Société du Grand Paris – et les six organismes de sécurité sociale (dont les caisses d’allocations familiales, les caisses primaires d’assurance maladie et les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail).

Ledit article précise que « les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux qui en font la demande peuvent participer, pour les domaines relevant de leurs compétences, à l’institution d’un référent unique, dans des conditions définies par une convention signée avec les services de l’Etat compétents »[8].

Les textes ouvrent la possibilité pour les collectivités territoriales qui en font la demande de s’associer à ce dispositif. Cela devrait permettre de favoriser un meilleur dialogue entre des administrations relevant de personnes publiques distinctes qui se partagent des compétences dans un même domaine d’action.

L’expérimentation est donc limitée à un certain nombre d’administrations de tailles suffisamment importantes pour permettre de dégager des indications nécessaires avant une éventuelle généralisation du référent unique.

Les résultats de l’expérimentation

La réussite de la satisfaction des usagers générée par la mise en place du référent unique devra être mesurée. En effet, l’objectif de la centralisation par un référent unique des demandes présentées par les usagers devra permettre un traitement optimisé de ces demandes, par la connaissance que ce référent aura des services compétents pour les traiter.

L’article 29 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 énonce d’abord que l’expérimentation fera l’objet d’une évaluation, en 2022, notamment de son impact sur les délais de traitement des demandes. L’article 3 du décret n°2018-1352 du 28 décembre 2018 précise ensuite que dans « les six derniers mois qui précèdent la fin de l’expérimentation, les ministères concernés adressent conjointement au Premier ministre un rapport sur l’instauration des référents uniques qui évalue notamment son impact sur les délais de traitement des demandes adressées par les usagers. »[9]

Enfin,  le Premier ministre aura à remettre au Parlement un rapport global d’évaluation dans les trois mois qui suivent la fin de l’expérimentation. Avant une éventuelle généralisation du référent unique en 2023, ces rapports auront à mesurer les degrés de satisfaction des usagers s’adressant directement à un interlocuteur unique auprès du service compétent pour traiter leurs demandes.

Gageons que le lien entre l’usager et l’administration en ressorte renforcé.

Dominique VOLUT, Avocat à la Cour, Docteur en droit public, Cabinet MPC Avocats

[1] Loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance (dite ESSOC), J.O.R.F, n°0184 du 11 août 2018, texte n° 93.

[2] Décret n° 2018-1352 du 28 décembre 2018 relatif à l’expérimentation du référent unique, J.O.R.F n°0302 du 30 décembre 2018, texte n° 83.

[3] Exposé des motifs du projet de loi pour un Etat au service d’une société de confiance, n° 424, déposé(e) le lundi 27 novembre 2017, p 12.

[4] Op.Cit. Loi n° 2018-727 du 10 août 2018.

[5] Op. Cit. Décret n° 2018-1352 du 28 décembre 2018

[6] Op. Cit. Exposé des motifs du projet de loi pour un Etat au service d’une société de confiance

[7] Op. Cit. Décret n° 2018-1352 du 28 décembre 2018.

[8] Ibidem.

[9] Ibidem.

 

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