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Industrie du futur : vers une responsabilisation croissante des industriels en matière de gestion des risques environnementaux

MARIE-LEONIE VERGNERIE

Marie-Léonie Vergnerie est associée au sein du bureau de Paris de Fieldfisher, dont elle dirige la pratique Environnement & Energies Renouvelables.

Exerçant depuis près de vingt ans dans ce domaine, elle a développé une expertise reconnue en matière de gestion des déchets, d’économie circulaire et de gestion de sites et sols pollués.

Elle répond pour Comundi à 3 questions autour du droit de l’environnement industriel.

Quelles sont les points de vigilance et nouveautés à appréhender en matière de droit de l’environnement industriel et de gestion des risques environnementaux ?

Les dernières évolutions réglementaires vont dans le sens d’une responsabilisation beaucoup plus forte des industriels.

D’un côté, en matière de contrôle des activités industrielles, on assiste à un transfert de cette mission qui était auparavant l’apanage exclusif de l’administration vers le secteur privé. Ainsi, par exemple, les exploitants d’installations classées doivent de plus en plus s’auto-contrôler, ou plus exactement faire contrôler leurs activités ou leurs travaux de dépollution par des bureaux d’études agréés ou certifiés (voir en dernier lieu le décret n°2021-1096 sur la gestion des sites et sols pollués post-cessation d’activité). De même, l’extension des dispositifs dits de « responsabilité élargie des producteurs » par la loi AGEC (loi n°2020-105 Anti-Gaspillage et Économie Circulaire) conduit à rendre les fabricants de nombreuses catégories de produits responsables, non plus seulement de la fonctionnalité et de la sécurité de leurs produits, mais de l’entier cycle de vie de ceux-ci, de leur éco-conception à la prise en charge des déchets qui en résultent.

De l’autre côté, en matière de sanctions, l’administration conserve voire étend substantiellement ses prérogatives, avec notamment la multiplication des amendes administratives.

Ces mouvements reflètent autant la volonté du législateur de responsabiliser l’industriel et de répondre aux attentes croissantes du public de mise en œuvre du « principe pollueur-payeur« , que celle de rationaliser la charge des inspecteurs de l’environnement dont les moyens et les ressources n’évoluent plus depuis de nombreuses années. Dans la pratique cependant, la phase de mise en œuvre s’annonce complexe voire douloureuse, car ces responsabilités nouvelles s’assortissent de surcoûts importants, et ce à des échéances courtes.

Quelles difficultés sont les plus rencontrées par vos clients industriels actuels ?

Je n’ai cité que deux exemples précédemment mais la gestion des risques chimiques post-Lubrizol, le changement climatique, ou encore la nécessaire prise en compte de la biodiversité sont des sujets désormais pleinement investis par le législateur. Nous n’en sommes plus aux pétitions de principe et aux vœux pieux mais au stade de l’action dans l’urgence. Cela se traduit par une réglementation foisonnante, d’une grande complexité technique, et dont l’articulation n’est pas toujours parfaitement « huilée ».  Bien que mes clients industriels aient tous mis en place divers dispositifs de veille, ce foisonnement réglementaire, qu’il soit d’impulsion nationale ou européenne, est tel qu’il est difficile voire impossible d’avoir une visibilité parfaite sur l’ensemble des contraintes réglementaires à venir et sur leurs conséquences opérationnelles et économiques.

Que conseillez-vous aux industriels pour s’adapter au mieux à cet impératif environnemental ?

Anticiper! Mais c’est plus simple à dire qu’à faire. Il faut s’entourer de compétences adaptées. Externes, avec des bureaux d’études et (bien sûr) des avocats expérimentés, mais aussi en interne : l’enchevêtrement des contraintes environnementales qui s’imposent à un même industriel nécessite un suivi au quotidien, par un personnel qualifié. Il faut également prévoir de mettre la main à la poche, pour s’entourer de ces compétences autant que pour se porter à la hauteur des responsabilités et des investissements que j’ai mentionnés. C’est particulièrement difficile après l’année et demie que nous venons de traverser, mais anticiper permet aussi de se donner l’opportunité de la réflexion, de l’innovation, et de transformer ces contraintes (qui ne vont pas aller en diminuant) en atouts.

 

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