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L’IA : outil préventif contre les risques psychosociaux ou menace ?

Les risques psychosociaux (RPS) qui affectent la santé des salariés font partie des défis à relever au sein des entreprises. Une meilleure prise en compte de ces risques permet des progrès significatifs à cet égard. L’essor grandissant de l’IA dans le monde du travail tend par ailleurs à modifier la donne. Les stratégies doivent s’adapter, afin d’améliorer le bien-être du personnel, puisque l’IA est là pour durer.

Quand l’IA aggrave les RPS

La crainte de perdre son emploi

Déclarée grande cause nationale en 2025, la santé mentale devient un enjeu crucial dans tous les secteurs d’activité. L’irruption de plus en plus rapide de l’IA dans leur environnement professionnel rend les salariés anxieux. « Le Monde Éco » du 11 avril 2024 évoque la perte d’effectifs parmi les acteurs du retail chez Carrefour. Pas moins de 35 000 postes ont été supprimés, au profit d’une assistance par IA. À moindre échelle, cette menace sur l’emploi, justifiée ou non, pèse sur le psychisme des employés. L’anxiété qui en découle risque d’entraîner des troubles plus graves, comme une dépression.

Un désinvestissement personnel plus marqué

L’automatisation de certaines tâches via l’IA tend à déresponsabiliser les employés jusque-là en charge de ces missions. Même si leur poste reste actif, les travailleurs peu qualifiés et les cadres ressentent ce changement de manière négative. Selon un sondage IPSOS de 2025, 50 % des Français jugent l’IA bénéfique pour gagner du temps. Seuls 27 % pensent qu’elle peut améliorer leur travail. Certains ressentent cette mutation comme un manque de confiance vis-à-vis de leurs compétences, voire une régression. L’enquête du « Monde » en date du 23 août 2024 fait mention d’une baisse objective des savoir-faire de 30 %.

Une communication altérée entre collègues

La jonction entre IA et risques psychosociaux apparaît aussi au niveau relationnel et peut potentiellement créer une fracture générationnelle. Sans faire de généralités, le recours systématique à l’intelligence artificielle désavantage les salariés peu familiers avec les nouvelles technologies. Là encore, ils risquent de se sentir dépassés dans un cadre de travail dysfonctionnel. Lorsque l’intelligence artificielle encourage la créativité individuelle des employés, il existe aussi un risque. Chacun se sent plus productif sans l’avis de ses pairs. Avec moins de séances de brainstorming, la réflexion collective se voit réduite au minimum au sein de l’entreprise. L’isolement et ses conséquences pathologiques sont alors à craindre pour le personnel.

Une perte d’attention à long terme

Une étude menée par des chercheurs du MIT Media Lab confirme un déclin de l’engagement cognitif dû à l’IA et les impacts psychiques négatifs de cette technologie. Ainsi, cette étude démontre que les personnes utilisant l’IA ont une connectivité neuronale 55% plus faible que les personnes ne l’utilisant pas.

Par ailleurs, l’étude s’appuie aussi sur une analyse réalisée par OpenAI pour démontrer une plus grande dépendance émotionnelle ainsi qu’une faible socialisation et une plus grande solitude chez les utilisateurs de l’IA.

Par conséquent, si l’utilisation de l’IA peut apporter une plus grande efficacité à court terme, son impact sur le cerveau montre qu’elle est contre-productive avec une perte de compétences long terme.

Une approche préventive des RPS grâce à l’IA

Si l’IA comporte des risques, elle peut aussi être utilisée dans certains pour apporter des solutions.

Un outil de détection précis

Il est possible de confronter IA et risques psychosociaux afin de repérer ces derniers parmi les salariés. Un logiciel de gestion RH adéquat s’avère optimal pour alerter, par certains signaux faibles. L’IA dûment programmée est en mesure de pointer une augmentation des arrêts maladie, un potentiel indicateur de surmenage des salariés. Le baromètre Empreinte Carbone avec Opinion Way relève l’efficacité de la prévention. Les troubles de santé mentale affectent 1,5 à deux fois moins de salariés grâce à une stratégie en amont. Le repérage précoce est reconnu par l’OMS comme la clé pour favoriser de meilleures conditions de travail.

L’IA pour la prévention primaire

Cette méthode vise à réduire l’exposition des salariés aux risques psychosociaux. L’IA peut servir à organiser les plannings, avec une répartition optimale des tâches. Cependant, il faut y intégrer des paramètres qui tiennent compte de la situation particulière de chaque employé concerné.

Éviter la surcharge de travail diminue le stress avant la réalisation des missions. Le bien-être des équipes est renforcé, ainsi que leur motivation et, par conséquent, leur productivité. Une moindre pénibilité dans l’organisation des tâches complexes grâce à l’IA soulage aussi la charge mentale des salariés. Ce gain en qualité de vie au travail leur permet également de développer leurs compétences transversales.

L’IA peut notamment aider les RH à proposer des solutions complémentaires au suivi médical si celui-ci est nécessaire. Pour proposer des soutiens psychologiques adéquats ou organiser des formations bien-être en entreprise, l’outil IA fait gagner du temps. Cependant, ce volet de soin doit impérativement impliquer un accompagnement humain. L’intelligence artificielle ne peut en aucun cas remplacer une écoute empathique.

Une meilleure utilisation de l’IA

L’organisation de l’entreprise gagne à fonctionner avec un système d’information subtil pour prendre des décisions qui réduisent les RPS. En effet, IA et risques psychosociaux peuvent créer un duo indissociable et toxique, faute d’innovation avec leadership humain. Des plannings encadrés à 100 % par les algorithmes de l’intelligence artificielle génèrent à coup sûr stress et conflits internes. Intégrer des critères humains dans le système d’information de l’entreprise facilite un usage approprié de ces technologies. Dans le respect du RGPD, cette exigence peut s’appliquer à l’évaluation et à la promotion des salariés.

Entre confiance et méfiance : quelle ligne adopter ?

Un usage maîtrisé de l’IA

Les atouts de l’intelligence artificielle sont réels, y compris pour rendre le quotidien des salariés plus agréable. Comme compléments du travail effectif du personnel, des algorithmes bien programmés constituent une plus-value en termes de bien-être. Tels des filets de sécurité, les logiciels IA sont utiles pour seconder les travailleurs dans des conditions difficiles et risquées, en particulier la nuit. Pour éviter un lien de cause à effet entre IA et risques psychosociaux, la qualité du management humain s’avère décisive.

Privilégié l’humain et la formation des salariés

Pour éviter que les travailleurs associent IA et risques psychosociaux comme un tandem néfaste, il faut les intégrer au changement. Former à l’utilisation de l’IA dans les process internes évite les craintes et limites les impacts négatifs. En outre, il reste préférable d’impliquer les salariés dans certaines prises de décision liées à l’intelligence artificielle.

Pour prévenir les risques psychosociaux, il est important de comprendre que l’IA est un outil et non un remplaçant des salariés. Ainsi, l’entreprise préserve ses atouts sur le long terme et évite de tomber dans le piège de la dépendance à cette technologie qui, dans la majorité des cas, n’appartient pas à l’organisation qui l’utilise.

Dans tous les cas, la valorisation des compétences 100 % humaines reste primordiale.