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« Des salaires à 300.000 euros » : les profils qualifiés dans l’IA générative, « peu nombreux et courtisés »

Les profils qualifiés dans l'IA générative

A l’heure où les entreprises s’intéressent de près à l’IA générative, les salariés les plus qualifiés sur le sujet s’arrachent, explique Benoît Binachon, associé de Uman Partners, cabinet de chasse spécialisé dans les fonctions data et IA.

Au vu de l’intérêt des entreprises pour l’intelligence artificielle, les profils compétents en la matière sont-ils les rois du pétrole ?

Oui, en particulier ceux qui ont des connaissances pointues, scientifiques et techniques en IA générative, technologie encore récente. Ils sont peu nombreux, recherchés, courtisés et peuvent donc prétendre à des rémunérations particulièrement élevées. Ce sont des data scientists, très matheux, qui ont fait de la recherche et sont diplômés d’écoles prestigieuses : Polytechnique, Normale Sup’, Les Mines, Centrale Supélec…

Les entreprises leur demandent de créer des modèles dits « fondamentaux ». Finalement, d’effectuer des travaux de chercheurs. Ils ont un rôle de créateurs, d’inventeurs. S’ils sont aussi désirables, c’est parce qu’il n’existe pas encore suffisamment de librairies d’algorithmes packagés utilisables par des gens moins experts qu’eux.

Quelles sont les entreprises qui les recrutent ?

Les grandes entreprises de la tech comme Meta, OpenAI, IBM, Microsoft ou encore Google, les start-up et les scale-up comme Mistral. Celles qui ont fait de grosses levées de fonds sont parfois prêtes à offrir à des managers qui occupent ces postes des salaires à 200 ou 300.000 euros bruts annuels, assortis de stock-options.

Il n’y a quasiment que sur ces profils qu’elles sont d’accord pour mettre autant d’argent sur la table. Si elles le font, c’est souvent parce que l’IA générative fait partie de leur business model, que c’est au coeur même du produit qu’elles commercialisent, parce qu’elles ont besoin d’avoir leur propre IA spécialisée. Mais ces entreprises sont assez peu nombreuses en Europe.

Autre option pour ces profils qualifiés : travailler entièrement à distance pour des entreprises américaines de la tech, dans lesquelles ils peuvent empocher des rémunérations similaires à celles mentionnées plus haut. Pour les entreprises américaines, embaucher dans l’Hexagone et plus largement en Europe, c’est avoir de la main-d’oeuvre lowcost, car ces profils sont deux fois moins payés que leurs collègues aux Etats-Unis.

L’âge d’or que rencontrent ces profils va-t-il se tasser ces prochaines années ?

Oui, ce phénomène se tassera un peu. Pas parce qu’il y aura plus de gens formés, mais parce que la technologie va devenir plus mature. Des solutions et produits bien packagés permettront à des équipes techniques moins qualifiées de construire des IA génératives plus facilement, en assemblant des briques préfabriquées.

Avec la démocratisation de l’IA générative, d’autres profils sont-ils actuellement recherchés ?

Beaucoup d’entreprises « traditionnelles », quand elles ont une initiative de transformation data/IA, recrutent aujourd’hui des profils capables de piloter ces changements. Des gens qui ont surtout des capacités de leadership, pas forcément des experts techniques de l’IA. Elles vont donc piocher chez des diplômés d’écoles d’ingénieurs, mais aussi de Sciences Po ou d’écoles de commerce.

Leur rôle : faire le lien entre les équipes techniques, qui fabriquent des produits, et les métiers qui vont être transformés en interne. Dans une usine d’assemblage de voitures, un employeur peut par exemple chercher quelqu’un pour piloter le passage d’un contrôle visuel et humain des pare-chocs à un contrôle automatisé.

La rémunération de ces professionnels est élevée par rapport à ceux qui n’exercent pas dans la data et l’IA. A titre d’exemple, un product manager solide dans le secteur peut empocher 100.000 euros bruts annuels à Paris. Mais leurs salaires n’augmentent pas comme ceux des data scientists experts en IA générative. Pourquoi ? Car ces derniers sont plus qualifiés techniquement et moins nombreux sur le marché.

Chloé Marriault