Concevoir et aménager des open-spaces agréables à vivre : les conseils d'un architecte

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Interview d'Aldo Zoli, Architecte et consultant

Passionné par l'approche de l'accompagnement au changement liée au fonctionnement et aux objectifs de l'entreprise dans le cadre d'un nouvel aménagement de l'espace de travail, son champ d'activité comprend la programmation stratégique, la communication et la formation en entreprise. Il intervient sur des projets d'entreprise où il cordonne des équipes pluridisciplinaires pour conduire des études sur l'importance de la marque, les valeurs de l'entreprise, et la mise en place de nouvelles formes d'organisation des espaces de travail. Son objectif est de faire de l'espace un atout fonctionnel au service du business, créateur de qualité de vie au travail et de sens d'appartenance à l'entreprise.

Il anime la formation Open-space : maîtriser les règles d'aménagement et accompagner le changement.


Quels sont les principaux avantages et inconvénients de l'open-space ?

Tout d'abord, j'ai banni depuis longtemps de mon vocabulaire le mot « open-space » et j'utilise à la place « espace collaboratif » ou « espace d'équipe ». Ce n'est pas de la démagogie mais, en France, l'open-space a en général une connotation très négative. Les gens s'imaginent un espace sans fin avec des postes de travail à l'infini comme on pouvait le voir dans certaines images des bureaux américains des années 1970-1980 !

Pourquoi un espace collaboratif ou espace d'équipe ?  Parce qu'il s'agit d'un espace qui est partagé par un groupe de personnes qui travaillent ensemble, où l'information circule de façon plus fluide et immédiate. On se parle, on communique, on échange : on produit et construit ensemble !

Les avantages sont vraiment liés à une meilleure visibilité des collaborateurs entre eux et au partage des informations qui se fait de façon plus directe : c'est un gain de temps dans la prise de décision. Il faut aussi dire que, pour les entreprises, c'est aussi un moyen très efficace de rationaliser l'espace et d'obtenir une réduction des mètres carrés globaux (et donc des coûts).

Les éventuels inconvénients sont liés surtout à la notion d'espace « en commun » et du manque d'intimité et de repères. Vivre en communauté signifie savoir respecter l'autre et se faire respecter, ce n'est pas vivre caché derrière 4 murs et un ordinateur ! Il faut rechercher l'intimité et la confidentialité au travers de la mise à disposition d'un choix d'espaces différents à utiliser tout au long de la journée selon les tâches à accomplir, avec des solutions de traitements acoustiques et du mobilier approprié.

Y a-t-il des populations ou des métiers qui s'adaptent mieux à l'open-space ?

Il n'y a pas vraiment de règles car chaque entreprise est différente et les cultures d'entreprise jouent un rôle essentiel dans la vision du bureau de demain ! Je suis persuadé que notre monde va de plus en plus vers des espaces collaboratifs car il n'y a pratiquement plus de métiers isolés et que le partage fait la réussite, tous métiers confondus !
Les RH, les métiers légaux, les finances et les chercheurs peuvent très bien partager des espaces (et même des labos !) de la même façon qu'une équipe créative. Sans oublier qu'aujourd'hui (et cela déjà depuis au moins 20 ans dans les pays anglophones !), des comités de direction et des équipes de dirigeants travaillent dans des espaces collaboratifs et n'ont plus des bureaux fermés !

Ce n'est pas non plus une question d'âge car parfois, les personnes qui ont plus d'expérience sont presque plus prêtes au changement que certains jeunes (surtout les ingénieurs !) qui rentrent en entreprise avec des notions préconçues par rapport à la hiérarchie, le statut, les droits acquis, le fait d'exercer un métier à caractère « intellectuel », etc.

Quelles sont les règles de base à respecter pour concevoir et aménager des open-spaces agréables à vivre ?

Comme pour tout changement dans notre vie (se marier, avoir des enfants, changer de maison, changer de travail, aller vivre à l'étranger, etc.), aller dans un nouvel environnement de travail demande une période d'adaptation. Il faut donc toujours trouver les mots et les arguments pour expliquer et « dédramatiser » les situations de résistance ou de refus. Il ne faut pas que le changement soit considéré comme une rupture et un « saut dans le vide », mais plutôt comme une évolution vers de nouveaux modes de travail plus adaptés à l'évolution naturelle et vertigineuse des technologies et des synergies entre collègues, mangement, clients/fournisseurs...  N'oublions pas que nous sommes de plus en plus dans un monde où les mots « globalisation », « organisation matricielle » et « multi-sites » sont de plus en plus des réalités !  Il faut certainement un certain degré d'adaptation, mais l'adaptation peut être facilitée en comprenant les raisons liées au changement. On n'est pas forcément opposé au changement, mais on refuse qu'on nous l'impose !

Mettre en place une démarche participative et à l'écoute des collaborateurs est certainement une façon de créer un esprit de co-construction ! Voici des pistes de réflexion envisageables pour faire en sorte que l'acceptation se fasse au mieux :

1. Instaurer le dialogue avec les bons interlocuteurs selon les différentes étapes d'un projet :
- La direction générale pour la phase de la programmation stratégique
- Les responsables ou directeurs des divisions/services pour le macro zoning
- Des groupes de collaborateurs pour la compréhension des différents métiers
- Des groupes spécifiques pour le branding, l'IT, le rangement et l'archivage, etc.
- Les partenaires sociaux : tout au long du projet

2. Travailler sur des règles de vie en commun dans le nouvel environnement de travail. Il faut que tous les espaces soient compris et appréhendés. Un environnement de travail ne peut pas être composé que d'espaces collaboratifs, et il est essentiel d'intégrer des salles de réunions des tailles diverses et variées, des espaces d'échanges informels, des espaces de concentration individuelle et des espaces communs de « support » (salles de reprographie, rangement/archivage par étage), etc.

3. Mettre en place une étude de post-occupation 3 à 6 mois après l'aménagement dans les nouveaux locaux pour partager un « post mortem » du projet, et ainsi comprendre ce qui a bien marché et travailler sur d'éventuels axes d'amélioration

Si vous aviez 3 conseils à donner pour réussir un projet de mise en place d'espaces de travail ouverts et accompagner le changement. Lesquels seraient-ils ?

La clef du succès d'un projet d'entreprise sont la communication et l'accompagnement. Il ne s'agit pas de « mettre en place des espaces ouverts » mais de comprendre les objectifs et le fonctionnement d'un entreprise en termes d'évolution des modes de travail et de processus pour analyser, étudier et proposer un environnement de travail qui soit adapté. Il faut donc :

1. Analyser la situation actuelle et se poser les bonnes questions sur les objectifs du business, la culture de l'entreprise, son image de marque et l'évolution des métiers.

2. Mettre en place un dispositif d'accompagnement et de communication avec l'ensemble des collaborateurs en partant de la direction générale et en incluant les partenaires sociaux dans le projet en amont afin d'écouter, de partager, de proposer, et d'expliquer tout au long du développement du projet et de ses différentes étapes.

3. Travailler sur un concept d'aménagement qui soit le résultat d'un travail de collaboration avec l'entreprise, adapté aux objectifs de la direction générale et organisé autour des synergies principales entre les différents groupes, avec tous les espaces nécessaires au bon fonctionnement du business et des métiers.

Une bonne dose d'écoute, de force de proposition et d'adaptabilité ainsi qu'une créativité proactive sont donc nécessaires !

 

05/05/2015

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