Co-contruire et partager une vision percutante - Interview de JL. Phulpin et B. Collet

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5 questions à nos experts Jean-Luc Phulpin (Cultivateur d'influence) et Béatrice Collet (Connecteuse de synapses). 
Ils co-animent le module 1 du cycle "Leadership et Influence", intitulé "Co-construire et partager une vision percutante"

1.  Quelles sont selon vous les composantes du leadership du 21ème siècle ?

Jean-Luc Phulpin - Etre leader aujourd'hui et surtout demain nécessite d'intégrer un changement complet dans l'art de manager : la hiérarchie et l'autoritarisme n'impressionnent plus dans un monde où chercher et faire circuler l'information est devenu une seconde nature.

Le contexte aussi a changé, notamment la réorganisation du travail en projets, le développement du management transverse et une évolution des mentalités. Être leader, c'est être à la fois reconnu comme tel et accepté dans ce rôle ; on est loin de la « nomination » ou de l'auto-proclamation !
Le leadership repose selon moi sur de grandes qualités humaines (écoute, humilité, humanité -compassion comme le dit Matthieu Ricard), un sens aigu du service (hé oui, un leader est au service des autres), une éthique sans faille.
Le leadership repose aussi sur la maîtrise de plusieurs « arts » : élaborer une vision qui entraîne, confronter points de vue et positions de façon créative, appuyer son discours par un langage corporel approprié, bien gérer son énergie.

Béatrice Collet - Dans un monde qui se complexifie, le leader qui transforme des projets d'entreprise en succès a besoin de devenir de plus en plus la personne qui sait poser les bonnes questions, qui donne envie à ses collaborateurs de se sentir complètement engagés, plutôt que la personne omnisciente qui fournit toutes les bonnes réponses et dont l'avis et l'opinion sont les principaux recherchés. C'est un changement de posture important qui est en phase avec de nouvelles valeurs et d'attentes qui émergent d'un monde en mutation.

2.  Qu'est-ce qui fait la différence dans l'élaboration d'une vision d'entreprise, d'une vision d'équipe ?

Béatrice Collet - La force d'une vision se mesure à sa capacité à mettre en mouvement chaque collaborateur, particulièrement dans les moments difficiles où la motivation est testée, est mise à l'épreuve.

Pour prendre une analogie, imaginons différents tailleurs de pierre à qui nous poserions la question : que fais-tu ?
     - Le premier répond avec un soupir : « cela se voit, je taille une pierre... »
     - Le second répond, concentré sur sa tâche : « cela se voit, je construis un mur. »
     - Le troisième inspiré répond : « cela se voit, je bâtis une cathédrale. »

Quelles différentes visions ont ces tailleurs de pierre de leur contribution par leur travail ? Comment le tailleur de pierre inspiré a construit cette différence qui fait la différence ? Nous ressentons bien là qu'une vision inspirante a besoin d'être incarnée pour devenir puissante, avec des mots qui résonnent au-delà de la sphère purement intellectuelle.

Jean-Luc Phulpin - Nos clients ne comprennent pas tout-de-suite ce qu'est une vision et en quoi elle est utile : ils croulent déjà sous les objectifs, les plans stratégiques, les livres blancs ... Ce qui fait la différence, c'est le processus d'élaboration de leur vision, en particulier le soin apporté à son partage : ce n'est plus la vision d'une personne, mais celle d'une équipe. Pour faire sens, elle répond à des questions précises que se posent ceux auxquels elle est destinée.

Nous avons expérimenté qu'une « bonne » vision répondait à un cahier des charges précis, chaque fois personnalisé et transmettant à coup sûr une impression forte : celle de l'engagement personnel de son porteur.

3.  Comment très concrètement mobiliser l'intelligence collective pour embarquer dans une vision qui fait sens ?    

Béatrice Collet - Il existe de très nombreuses façons simples ou moins simples de mobiliser l'intelligence collective. La difficulté la plupart du temps ne réside pas tant dans les techniques utilisées que sur la clairvoyance du leader de faire le choix de recourir à l'intelligence collective au moment opportun. Le leader a dans sa trousse à outils plusieurs possibilités managériales, dont l'intelligence collective, mais pas seulement. L'intelligence collective n'est pas une réponse à tout. Mobiliser l'intelligence collective nécessite avant tout une grande curiosité.

Jean-Luc Phulpin - Précisément en appliquant les principes de l'intelligence collective pour rechercher du sens, identifier les questions, faire surgir idées et propositions.

4.  Quelle communication adopter pour créer l'adhésion autour de sa vision ?

Jean-Luc Phulpin - Le principal danger, une fois cette vision élaborée, c'est de la trouver tellement « géniale » que l'on croie qu'elle se vendra toute seule. Pour éviter les réactions classiques de refus, déni, sabotage ..., le leader prendra un soin particulier pour présenter ses idées, les confronter, accueillir oppositions, critiques et nouvelles idées avec bonheur. L'erreur habituelle consiste à s'appuyer sur son « charisme » pour passer en force : il convient au contraire de faire preuve d'humilité, d'écoute, de sens du partage et d'un réel intérêt pour ses interlocuteurs. Bref, chercher à être influent mais pas manipulateur.

Béatrice Collet - Le processus de création de la vision prend souvent du temps, un temps « d'incubation », le temps que tous les membres qui participent à son élaboration échangent, cheminent, s'opposent, se mettent d'accord. Or paradoxalement, plus la vision a mis du temps à être élaborée, plus l'impatience est grande de la « cascader » rapidement, en demandant finalement à des collaborateurs qui l'entendent pour la première fois de faire tout ce chemin de compréhension, d'accueil des résistances, d'appropriation en un temps court et condensé. La clé de la réussite réside dans une communication qui permette à chacun d'intégrer les différentes étapes.

5.  Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur vos parcours respectifs ?

Jean-Luc Phulpin - Une évolution assez classique dans le monde industriel, qui débouche sur une prise de conscience du facteur humain et l'envie de m'y consacrer, initialement comme chasseur de têtes puis comme conseiller en développement personnel et depuis cinq ans maintenant une focalisation sur les processus de leadership et d'influence.

Béatrice Collet - Après avoir managé de larges équipes, j'ai exercé une grande partie de ma carrière au sein de comités de direction en tant que directrice des Ressources Humaines. J'ai ensuite souhaité explorer plus en profondeur ce qui me passionne et je me suis tournée vers le coaching et la facilitation - c'est-à-dire l'accompagnement d'équipes et de groupes dans l'émergence de leurs propres solutions.

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