Les risques psychosociaux dans la fonction publique

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Valéry DUFLOT, Sociologue du travail et de l'administration, CABINET SECAFI (Membre de la FIRPS) répond à trois questions. Il anime la formation "Réduire l'absentéisme en prévenant les risques psycho-sociaux dans la fonction publique".

 

La fonction publique est-elle davantage touchée par les risques psychosociaux que les autres secteurs ? Quelles sont ses spécificités ?

La Fonction publique traverse actuellement une période de changements importants : fusions de services, réorganisations, diminution générale des effectifs, mais aussi de modifications des méthodes de travail, des dispositifs d'évaluation des agents, des attentes des usagers, etc...

Ces changements impactent directement les agents, leur travail, leur identité professionnelle. Parfois dans un sens qui peut être qualifié de « positif » par certains. Dans la plupart des services, dans un sens qui est perçu comme une dégradation des conditions de travail, avec des conséquences sur la santé physique, mentale et sociale.

En matière de risques psychosociaux, les spécificités de la Fonction publique ne tiennent pas à la nature des facteurs, ni aux troubles, mais aux configurations existantes. Par exemple, de nombreux agents ont une identité professionnelle centrée sur l'idée de service au public. L'introduction d'objectifs, la mise en place d'organisations du travail laissant moins de place à l'accompagnement des usagers, peuvent être déstabilisants sur le plan identitaire et se traduire par des situations de mal-être particulièrement aigües. Les agents vivent alors une perte du sens du travail, tout en étant pour certains confrontés à des usagers plus exigeants et parfois vivant eux-mêmes des situations difficiles socialement, favorisant le développement des comportements de défiance ou d'agression.

Les risques psychosociaux sont au cœur de l'actualité dans la fonction publique. Quels doivent-être, selon vous, les points de vigilance de la DRH ?

Le premier point est peut-être la prise de conscience de l'existence de contextes et situations particulièrement difficiles. La DRH peut favoriser cette prise de conscience en étant réceptive aux « remontées », qu'elles viennent de la médecine de prévention, des représentants du personnel, de l'encadrement de proximité, etc...

Il faut ensuite prendre au sérieux les signes de dégradation des relations ou des situations de travail. Le taux d'absentéisme par catégorie de population (service, qualification, tranche d'âge, etc...) et la forme des absences constituent des indicateurs pertinents. Une augmentation du taux d'absentéisme combinée à la multiplication des plaintes d'agents auprès des représentants du personnel peut être révélatrice de situations à risque sur le plan psychosocial.

Les changements de comportement (retrait, agressivité, etc...) doivent également être pris au sérieux. Lorsqu'il y a des conflits interpersonnels, il est important de ne pas en rester à un problème de personnalités, afin de se donner les moyens de voir si ce n'est pas la manifestation d'une dégradation de situations de travail. Cela implique de ne pas être d'emblée dans la recherche de responsabilités ni dans le jugement. Si l'on veut identifier les facteurs de risques, il est nécessaire de mettre en relation les comportements et les vécus, mais aussi d'avoir une posture compréhensive et explicative.

Plus généralement, chaque projet important ayant des répercussions sur l'organisation du travail implique de réaliser une étude des conséquences pour les agents et les collectifs de travail. Les six dimensions de facteurs de risques proposées par le rapport GOLLAC peuvent servir de grille de lecture.

Le développement de l'intérêt porté à la question des risques psychosociaux peut être l'occasion d'une évolution de la fonction RH vers plus d'indépendance vis-à-vis des responsables opérationnels et financiers, pour un meilleur équilibre entre les fonctions et une régulation plus efficace.

Quelles solutions s'offrent aux professionnels RH pour prévenir les risques psychosociaux de leur établissement ?

Les solutions peuvent être nombreuses, mais doivent passer par les mêmes étapes :

•    Faire de la prévention des risques psychosociaux une priorité

•     Mobiliser des acteurs de la prévention et des moyens

•     Identifier les facteurs de risques auxquels les agents sont exposés

•     Mettre en place des mesures de prévention afin de réduire cette exposition

•     Effectuer le suivi et l'évaluation de l'efficacité des mesures

Dans certains établissements ou services, c'est la DRH qui est à l'origine de la prévention des risques psychosociaux. Cela peut commencer par la mise en place d'un groupe de travail pour réaliser des travaux qui serviront à sensibiliser les responsables de l'établissement quant à la nécessité et à l'intérêt de mettre en place une politique de prévention. Le groupe de travail, composé d'acteurs de la prévention (médecine de prévention ou du travail, assistance sociale, DRH, représentants du personnel, etc...), peut examiner et discuter les différentes possibilités pour identifier les facteurs de risque, en tenant compte notamment du contexte et des moyens, mais aussi réfléchir à la mise en place d'un système de veille.

Cela peut ensuite passer par la sensibilisation et la formation des encadrants, à condition que le contenu et la forme des sessions soient adaptés et que ce dispositif soit articulé à d'autres de manière à favoriser l'appropriation des grilles de lecture et postures.

Pour les DRH qui ne sont pas à l'aise avec la question des risques psychosociaux, l'accompagnement dans un premier temps par un acteur spécialisé interne ou externe peut être une solution pour lancer une dynamique.

Pour profiter de réponses complémentaires concernant les risques psychosociaux dans la Fonction Publique, Comundi vous propose la formation suivante: "Réduire l'absentéisme en prévenant les risques psycho-sociaux dans la fonction publique".

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