Interview de Maître Cousin, Avocat à la Cour, qui anime la formation Tendance juridique des réseaux sociaux

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Interview de Maître Cousin, Avocat à la Cour, qui anime la formation Tendance juridique des réseaux sociaux

1) Quels sont les principaux dangers pour les entreprises sur les réseaux sociaux?

La popularité et l'attrait grandissant des réseaux sociaux en font aujourd'hui des outils de communication incontournables. Ils présentent néanmoins un certain nombre de risques pour les entreprises qui peuvent être regroupés en trois catégories.

La première série de risques est liée à l'usage des réseaux sociaux par les employés. Différents abus sont susceptibles d'être commis.

Ainsi, on peut citer l'hypothèse d'un abus de liberté d'expression lorsqu'un salarié critique sa hiérarchie ou encore tient des propos diffamatoires ou injurieux à l'égard de l'entreprise.

Le risque peut également porter sur la divulgation de données confidentielles. En effet, les utilisateurs de réseaux sociaux mettent en ligne des informations nombreuses et variées afin de valoriser leur profil. Des données confidentielles pourraient ainsi être communiquées, notamment sur les réseaux sociaux professionnels,  par des employés.

Enfin, l'entreprise est susceptible de voir sa responsabilité engagée du fait des agissements de ses salariés sur les réseaux, notamment en cas de mise en ligne de contenus illicites ou encore de violations de la loi Création et Internet, dite loi HADOPI, depuis un poste de l'entreprise.

En second lieu, les réseaux sociaux génèrent des risques d'atteinte à l'image des entreprises et à leurs droits de propriété intellectuelle. Ces atteintes peuvent être plus ou moins graves, certaines pages d'utilisateurs ou de groupes pouvant se livrer, pour des raisons commerciales ou idéologiques,  à la parodie, au dénigrement voire à la contrefaçon de marques. A ce titre, la pratique du « username squatting » peut être soulignée. Inspirée du « domain name squatting », ce procédé consiste à usurper l'identité numérique d'une entreprise en réservant sur un réseau social un nom d'utilisateur reprenant le nom ou la marque d'une entreprise, afin de détourner et de capter les internautes qui souhaiteraient consulter la page de l'entreprise.

La troisième catégorie de risques est relative à l'usage que peut faire l'entreprise des données personnelles présentes sur les réseaux sociaux, comme par exemple en cas de marketing direct. La collecte, le traitement et l'utilisation de ces données seront encadrés par les dispositions de la loi Informatique et libertés du 6 janvier 1978 dont le non respect est passible de sanctions pécuniaires de la CNIL et de sanctions pénales.

2) Quelles précautions doivent-elles prendre?

Afin d'encadrer l'usage des réseaux sociaux par les salariés, les entreprises peuvent adopter une Charte informatique qui aura pour objet de prévenir les risques liés à l'utilisation des outils informatiques. La Charte peut notamment définir des règles de bon usage d'internet, imposer un filtrage de certains sites, comme par exemple autoriser l'accès aux réseaux sociaux professionnels et bloquer l'accès aux autres réseaux, ou encore interdire la mise en ligne ou le téléchargement de contenus jugés sensibles ou illicites.

L'entreprise peut par ailleurs mettre en place des veilles sur les réseaux sociaux, afin de détecter rapidement les éventuelles atteintes à son image, sa réputation ou à ses droits de propriété intellectuelle, afin de pouvoir y répondre et y mettre un terme rapidement. Il peut aussi être parfois intéressant d'anticiper ces situations et de préparer par exemple une stratégie générale de communication à mettre en œuvre en cas d'atteinte (réponses sur les réseaux, communiqués de presse, ect...)

Enfin, en matière de gestion des données personnelles, il peut être intéressant de désigner au sein de l'entreprise un « Correspondant Informatique et Liberté » (CIL) qui sera investi autant d'un rôle pédagogique pour expliquer la loi et ses principes que de la tenue du registre des traitements de données personnelles réalisés dans l'entreprise. La formation du personnel ou, selon les cas, leur sensibilisation, à ces questions semble dans tout les cas être opportune.

3) Quels recours ont-elles?

Les salariés ayant publié sur les réseaux des contenus en violation de leurs obligations de loyauté ou de confidentialité pourront, selon les cas, être sanctionnés et dans les cas les plus graves, être licenciés pour faute.

Par ailleurs, face à un contenu qui porte atteinte à son image ou à ses droits, l'entreprise peut exercer un droit de réponse. Elle peut aussi agir en diffamation et engager la responsabilité de l'auteur de contenus

En outre, l'entreprise peut demander le retrait de ce contenu auprès de l'hébergeur, dans les conditions posées par la loi pour la confiance dans l'économie numérique du 21 juin 2004. S'il ne s'exécute pas, l'hébergeur engagera d'ailleurs sa responsabilité personnelle à l'égard de contenus. Enfin, s'il est porté atteinte à la marque de l'entreprise et que cette situation ne peut être réglée amiablement, une action en contrefaçon pourra être intentée.

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