Rupture des relations commerciales

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Interview de Maître Virginie Bernard

Maître Virginie Bernard est Avocate en charge du département droit économique au sein du Cabinet VIRGILE.

Sur ce thème, Comundi vous invite à découvrir la formation suivante: "Gérer la fin d'une relation commerciale établie".

Dans le contexte actuel de crise économique, assistez-vous à une recrudescence des contentieux liés à une rupture des relations commerciales ?

Oui. J'interviens actuellement sur des dossiers de rupture de relations commerciales qui sont directement liés à la crise. Dans ces dossiers, l'une des parties a mis fin pratiquement du jour au lendemain à des relations commerciales établies (encadrées par un contrat écrit ou non formalisées) ou a modifié de façon substantielle les conditions commerciales qu'elle accordait à son partenaire sans préavis. Dans certains dossiers, l'auteur de la rupture a donné une explication à son partenaire en invoquant, par écrit, des difficultés économiques et notamment une réduction de ses activités ou une baisse de ses commandes. Dans d'autres dossiers, l'auteur n'a invoqué aucune justification par écrit pour expliquer la rupture des relations ou les modifications apportées à ses conditions commerciales.

Quelles sont les précautions à prendre si l'on souhaite rompre une relation commerciale ? Comment cette rupture doit-elle être justifiée ?

Il faut respecter un préavis tenant compte de l'ancienneté des relations commerciales, d'une part, et, d'autre part, de la dépendance économique du partenaire, même si ce dernier critère ne figure pas dans la loi, et notifier par écrit la décision prise de rompre les relations. Si l'on ne respecte pas de préavis écrit, il faut s'interroger sur le risque que l'on prend à ne pas le faire et notamment si l'on peut justifier de circonstances particulières, étant observé que la loi ne prévoit que deux cas dans lesquels l'auteur de la cessation de relations commerciales peut s'affranchir du respect d'un préavis et s'exonérer de toute responsabilité de ce fait. Ces deux cas sont d'une part l'inexécution par le partenaire victime de la cessation des relations commerciales de ses obligations contractuelles et d'autre part le cas de force majeure. Dans les circonstances actuelles, la question se pose donc de savoir si les difficultés économiques de celui qui rompt les relations commerciales peuvent être assimilées à un cas de force majeure.
Toute la difficulté dans les dossiers que je traite actuellement est d'apprécier si le partenaire auteur de la rupture pouvait s'affranchir du respect d'un préavis autrement dit si la rupture des relations commerciales et/ou la modification sans préavis des conditions commerciales qu'il a imposées à son partenaire ont relevé d'une décision de sa part ou lui ont été imposées par la gravité de ses difficultés économiques.

Quelles sont les sanctions encourues en cas de rupture brutale ?

La sanction la plus probable est la condamnation de l'auteur de la rupture à des dommages-intérêts destinés à indemniser le préjudice subi par la victime du fait de la brutalité de la rupture des relations commerciales. Les tribunaux évaluent le montant de ces dommages-intérêts en calculant la perte de marge commerciale brute subie par la victime pendant la durée du préavis non respecté. Par exemple, si les tribunaux décident que la victime aurait dû bénéficier d'un préavis de six mois, alors que son partenaire a rompu sans aucun préavis, les juges évalueront le préjudice en calculant, à partir de la marge moyenne réalisée sur des exercices comptables précédents, la marge commerciale brute perdue par la victime pendant une durée de six mois. Pour estimer le montant du préjudice, les tribunaux peuvent tenir compte également des coûts des investissements réalisés par la victime pour le développement de ses relations commerciales avec son partenaire, à condition que la victime ait démontré que ces investissements étaient strictement dédiés à l'activité en question. Ils peuvent le cas échéant tenir compte également des coûts des licenciements, de l'atteinte portée à l'image et à la réputation de la victime de la rupture des relations.
Si la DGCCRF intervient dans un contentieux, ce qu'elle peut faire soit en initiant le contentieux de sa propre initiative soit en intervenant volontairement au contentieux introduit par la victime devant les tribunaux, elle peut demander aux tribunaux de prononcer une amende civile d'un montant maximum de deux millions d'euros à la charge de l'auteur fautif de la rupture des relations commerciales. Cette intervention de la DGCCRF n'est pas fréquente mais elle est permise par la loi.

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